Au milieu de la nuit, quand je cherche un miroir,
Je vais trouver la lune sous le vaste ciel noir
Et je la vois qui brille, mais je ne peux contempler
Qu’une seule de ses faces : l’autre demeure cachée !
Celle que je peux voir me renvoie mon visage ;
Elle regarde ici-bas, elle danse avec les âges
Et tournoie dans le ciel d’une telle façon
Qu’elle montre toujours d’elle la même dimension.
L’autre face est tournée vers l’océan des rêves.
Elle doit méditer. Invisible, elle observe
Défiler les astres avec les galaxies
Dans les noirceurs sublimes de l’abysse infini.
Cette face cachée, si je ne peux la voir,
Sa visible moitié me permet de l’atteindre
Et à moins que la lune s’éclipse dans le noir
Je viendrai chaque soir en ces lieux la rejoindre.
Mais soudain, malheur ! Un rideau de ténèbres
Se profile au loin : c’est l’ombre de la Terre !
Quand l’éclipse déprive la nuit de sa lumière,
L’âme est obscurcie par l’écran de la matière.
Et les passions s’enchaînent au rythme des marées,
Les élans d’allégresse animent les pantins !
Les regrets, la tristesse, un rien nous fait danser
Entre un ciel de velours et un plancher de crin.
Alors la lune dans son manoir,
Berçant un enfant endormi,
Verse une larme sur le miroir
Où se reflète le visage de l’Esprit.
Et l’âme derrière le miroir
Se sent bien triste qu’on l’oublie
Au profit de joies illusoires
Qui nous endorment,
Sous le ciel gris.
Jordan Cardinal
Extrait de Requiem (Chant II, le Miroir)
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